Tribune sur l’évolution du secteur coton en Afrique:

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Cette tribune vise à ouvrir le débat : l’enjeu n’est pas de dire “oui” ou “non” aux OGM, mais de choisir la voie qui renforce la compétitivité du coton africain tout en protégeant la santé, l’environnement et l’indépendance des pays producteurs.

OGM et coton en Afrique : trouver la voie de l’équilibre
L’Afrique est aujourd’hui face à un dilemme. D’un côté, la pression des changements climatiques, des maladies des plantes et de la concurrence mondiale pousse les producteurs de coton à chercher des rendements plus élevés. De l’autre, beaucoup redoutent qu’en ouvrant la porte aux organismes génétiquement modifiés (OGM), le continent ne devienne dépendant de quelques grandes entreprises de semences et ne prenne des risques sanitaires encore mal connus sur le très long terme.

Pourquoi certains défendent les OGM
Dans de nombreux pays producteurs de coton comme les États-Unis, le Brésil, l’Inde ou la Chine, les variétés de coton dites Bt (résistantes à certains insectes) ont montré des résultats impressionnants : en moyenne +20 % de rendement, –35 à –40 % de pesticides, et donc une amélioration du revenu des cultivateurs. Moins de pesticides signifie aussi moins d’intoxications et une pression moindre sur l’environnement. Des pays africains ont déjà franchi le pas : le Nigeria et le Kenya ont autorisé le coton Bt, avec des gains de rendement et une réduction des pulvérisations.

Pourquoi d’autres restent prudents
L’expérience du Burkina Faso est un avertissement. Après quelques années d’utilisation, le pays a retiré le coton Bt parce que la qualité de la fibre s’était dégradée, ce qui pénalisait les filatures et faisait chuter le prix de vente. Dans d’autres régions du monde, comme en Inde, certains insectes ont fini par développer une résistance, obligeant les agriculteurs à reprendre les traitements chimiques. Beaucoup craignent aussi une dépendance économique : les semences OGM sont plus chères et protégées par des brevets. Enfin, l’acceptation par les consommateurs reste un sujet sensible.

Un écart de productivité préoccupant
Pendant ce temps, l’Afrique reste loin derrière : au Mali, au Burkina ou au Bénin, le rendement moyen tourne autour de 350 à 480 kg de coton fibre par hectare, quand les champions mondiaux dépassent 1 800 kg/ha. Cet écart ne s’explique pas seulement par l’absence d’OGM : il tient aussi à l’irrigation, à la mécanisation et à la qualité des intrants.

Que faire ?
L’enjeu n’est pas de copier aveuglément les pays avancés, mais de construire une stratégie africaine. Quelques pistes :

  • Investir dans la recherche locale : tester des variétés OGM dans des instituts publics, en vérifiant la qualité de la fibre et l’impact sur l’environnement avant toute diffusion.
  • Négocier des licences équitables avec les détenteurs de brevets pour éviter une dépendance excessive et permettre aux producteurs de conserver un droit de ressemis.
  • Combiner les OGM avec d’autres pratiques : irrigation raisonnée, rotation des cultures, lutte intégrée contre les ravageurs. Les OGM ne sont qu’un outil parmi d’autres.
  • Informer et associer les citoyens : débats publics, évaluations scientifiques transparentes et claires pour bâtir la confiance.

Un choix de souveraineté
L’Afrique ne peut rester spectatrice des innovations qui redessinent l’agriculture mondiale. Mais elle ne doit pas non plus sacrifier sa souveraineté semencière ni la qualité de son coton, qui est son principal atout dans la chaîne textile. Le véritable défi est donc de participer à la recherche et d’avancer par étapes, avec des règles strictes et des objectifs clairs, afin que la technologie serve d’abord les intérêts des producteurs et de l’économie africaine.
H. Niang

diasporaction.fr

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