Dans cet entretien, Sékouba Cissé, secrétaire aux relations extérieures de l’Amicale des anciens ambassadeurs et consuls généraux du Mali, revient sur les missions d’un ambassadeur et analyse l’évolution de la diplomatie malienne.
Les missions d’un ambassadeur
Interrogé sur les fonctions d’un ambassadeur, Sékouba Cissé rappelle qu’elles sont clairement définies par la Convention de Vienne de 1961. Selon son article 3, un ambassadeur est chargé de :
- Représenter l’État qui l’envoie auprès de l’État d’accueil ;
- Protéger les intérêts de son pays et de ses ressortissants, dans le respect du droit international ;
- Négocier avec le gouvernement du pays accréditaire ;
- Collecter et analyser l’information par des moyens licites et en rendre compte à son gouvernement ;
- Promouvoir les relations amicales ainsi que les coopérations économiques, culturelles et scientifiques entre les deux pays.
Le Mali s’est inspiré de ces principes pour adopter le décret n°0517/P-RM du 20 juin 2018, définissant l’organisation et le fonctionnement de ses missions diplomatiques et consulaires.
Une diplomatie désormais plus affirmée
Sékouba Cissé estime que la diplomatie malienne continue de s’appuyer sur les grands principes inscrits dans la Charte des Nations unies, dont :
- l’égalité souveraine des États ;
- le règlement pacifique des différends ;
- le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des nations.
La politique extérieure du Mali, inscrite dans la Constitution du 22 juillet 2023, repose sur trois objectifs majeurs :
- Respect de la souveraineté du Mali ;
- Respect des choix stratégiques de partenariat ;
- Protection des intérêts du pays.
Selon l’ancien diplomate, ces orientations ont conduit à une diplomatie proactive, marquée par la prise d’initiatives après une longue période marquée par la présence de nombreuses forces étrangères (Serval, Barkhane, Takuba, Minusma, processus de l’Accord d’Alger, etc.).
Des partenariats stratégiques redéfinis
Sékouba Cissé souligne que le Mali reste ouvert à toute coopération fondée sur le respect mutuel. C’est dans ce cadre que le pays a renforcé ses partenariats avec :
- la Russie
- la Chine
- la Türkiye
- l’Iran
Ces pays ont notamment contribué à équiper et former les Forces armées maliennes (FAMa) et apportent un soutien politique au Mali dans les instances internationales, notamment au Conseil de sécurité de l’ONU.
D’autres États, comme les Émirats arabes unis, les États-Unis ou encore l’Allemagne, manifestent également le souhait d’intensifier une coopération fondée sur un modèle gagnant-gagnant.
Persona non grata et réciprocité diplomatique
Revenant sur la notion de persona non grata, Sékouba Cissé rappelle que l’État d’accueil peut, sans justification, demander le rappel d’un diplomate. Il cite les cas de la France et de la Suède, dont les ambassadeurs ont été expulsés, ainsi que la décision du Mali de rappeler son ambassadeur à Alger après l’abattage d’un drone malien.
Il explique également la réciprocité diplomatique, principe selon lequel un État peut adapter sa conduite en fonction de celle qui lui est opposée. Le Mali l’a appliqué, indique-t-il, en réponse :
- à la fermeture de la frontière algérienne,
- et aux mesures américaines de restrictions de visas, finalement levées.
Conclusion : une diplomatie de souveraineté assumée
Pour Sékouba Cissé, la diplomatie malienne actuelle se caractérise par :
- la défense prioritaire des intérêts du pays,
- la volonté de diversifier les partenariats internationaux,
- et une coopération renforcée au sein de la Confédération des États du Sahel (AES), notamment dans la gestion concertée de crises diplomatiques.
Selon lui, cette dynamique ne présente pas d’inconvénient majeur, si ce n’est la nécessité d’un consensus permanent entre les partenaires de l’AES afin de préserver l’efficacité de cette coordination.
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