Prétextant l’enlisement des militaires, après 5 ans de transition, l’Imam Mahmoud Dicko tente désespérément de se repositionner dans le jeu
politique malien depuis son exil algérien. Dans une « Feuille de route »ventilée sur les réseaux sociaux par des partisans, il propose « une
transition morale, sociale et républicaine » sous sa conduite. Sauf, qu’il faut être dupe pour ne pas voir que l’Algérie se serve de la mégalomanie
de l’apôtre de la Charia pour se repositionner au Mali. C’est oublier que la crédibilité de «l’Autorité morale » du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) s’est effritée depuis longtemps.
« Au Mali, le pouvoir militaire s’enlise… Les espoirs placés dans le régime militaire, issu de coups d’État successifs, se sont dissipés. Le discours
nationaliste et souverainiste, jadis porteur d’espoir, s’est transformé en un écran de fumée qui masque la réalité : l’échec sécuritaire, la dérive autoritaire
et l’isolement diplomatique » ! C’est ce qu’on peut lire dans une « Feuille de route » récemment attribuée à l’Imam Mahmoud Dicko sur les réseaux
sociaux. Dans ce contexte de « désillusion et de fracture », y a-t-on défendu, « Mahmoud Dicko apparaît comme l’homme providentiel d’une transition
nouvelle, fondée sur la légitimité morale, la sagesse et le dialogue inclusif ».
Face à ce « vide politique et moral », l’Imam Mahmoud Dicko demeure « l’un des rares leaders à conserver la confiance d’une majorité de Maliens, toutes
confessions et sensibilités confondues ». Le supposé « guide religieux » est donc tout désigné pour diriger ce qui est désigné dans la « Feuille de route » comme la transition de la dernière chance pour le Mali.
Force est de reconnaître que les axes prioritaires de celle-ci ne sont pas sans intérêt dans le contexte actuel. Pour mener à bien cette mission (s’il en a
l’opportunité), l’Imam qui a déserté la mosquée pour les arènes politiques compte « s’entourer d’hommes et de femmes de conviction, de compétences
et de patriotisme, capables d’incarner ce renouveau espéré ». Il compte s’appuyer sur les figures religieuses et morales, les acteurs politiques modérés, les technocrates et jeunes réformateurs, les médiateurs et artisans de paix et les forces sociales et économiques.
« Une transition réussie ne se décrète pas ; elle se construit avec les forces vives du pays sur la base d’un Pacte moral et social vers une transition de la
dernière chance. Le Mali n’a plus besoin d’une énième transition ou d’un dialogue de façade. Il a besoin d’un choc moral et politique, d’un retour à
l’éthique et à la foi dans la nation », a-t-on défendu dans le document. Pour le religieux et ses partisans, « seul un leadership légitime, capable de réconcilier
le peuple avec son État peut sauver le pays du naufrage. L’Imam Mahmoud
Dicko, par sa stature spirituelle et son sens du devoir, a aujourd’hui la responsabilité historique de fédérer les énergies et de conduire, ou du moins,
d’inspirer, une transition réellement salvatrice ».
Mais, à le lire, on a toutes les raisons de croire que l’ancienne « Autorité morale » de la contestation qui a eu raison du régime de feu Ibrahim Boubacar
Keïta prend « ses vessies pour des lanternes ». A-t-il encore une crédibilité et/ou une légitimité à diriger une transition au Mali ? Mégalomane réputé,
l’Imam Dicko n’incarne aujourd’hui aucune des valeurs énumérées dans sa «Feuille de route ». De la transition de 1992 à nos jours, il est animé d’une
seule volonté : mieux se positionner pour profiter de toutes les opportunités de« se rendre utile » pour préserver ses intérêts personnels. C’est pourquoi il ne supporte pas d’être dans l’ombre comme il l’est depuis son exil en Algérie. C’est pourquoi il n’a pas voulu retourner dans la « Mosquée » après
la « victoire » du 18 août 2020 sur feu le président Ibrahim Boubacar Keïta. C’était pourtant le meilleur choix à faire, en tant qu’Autorité morale, pour
garder ses distances et renforcer sa crédibilité.
Des Groupes armés terroristes chassés de leurs bases dans le nord et le centre du pays
Mais, sans doute, par crainte de l’oubli, il a refusé de se retirer de la scène politique et il a continué à vouloir tirer les ficelles pour rester un acteur
incontournable de la transition. D’où le discrédit qui le couvre aujourd’hui aux yeux d’une grande partie de l’opinion ! C’est facile de prendre ses rêves pour
de la réalité. Sinon, au Mali, on aura aucun mal à démonter sa fameuse « Feuille de route » !
Déjà dans ce que nous pouvons considérer comme le préambule de sa « Feuille de route », l’Imam passe à côté de la plaque de sa réhabilitation
souhaitée. En effet, dire que le régime militaire n’a pas de « cap politique clair » ou de « projet fédérateur »… découle de la très mauvaise volonté. Ceux
qui sont à la touche le sont par leur propre vouloir, pour des questions d’intérêt personnel. Même si, quelque part, on peut aussi reprocher aux tenants du
pouvoir d’être allergiques à la critique, à une certaine expression des convictions… Mais, cela n’est nullement une raison de s’auto-exclure du processus de transition. Le cap politique est très clair car balisé par des réformes indispensables à une gouvernance vertueuse. La transition est tout, sauf une navigation à vue.
Quant à la sécurisation, les résultats sont appréciables. L’expansion du terrorisme à tout le pays n’est pas le fruit d’un échec stratégique de la hiérarchie militaire. Bien au contraire, elle (stratégie) l’a imposé aux Groupes armés terroristes (GAT) qui ne peuvent plus disposer de bases sûres dans le nord et le centre du Mali. Ils ont donc opté pour une politique de harcèlement en s’attaquant aux civils et à des cibles économiques. Sinon, si on fait un bilan chiffré des affrontements de ces dernières semaines sur l’ensemble du pays, on verra bien.
Ce que l’islamiste appelle isolement diplomatique est un choix souverain dans lequel se reconnaît le peuple. Le Mali est loin d’être un pays isolé avec le
soutien non négligeable des BRICS… Nouveaux ambassadeurs. Sans compter que le pays se dit toujours ouvert au partenariat avec tous les pays,
pourvu que ce soit dans le respect des nouveaux principes fixés. Est-ce un crime de fixer une ligne rouge à ne pas franchir dans une coopération ?
Dans sa feuille de route, il est question de négociation, de dialogue… Qu’est-ce que les Maliens vont encore négocier ou vont-ils dialoguer autour de
quoi après tant de fora ? Tout ce autour qu’on peut négocier ou autour duquel on peut dialogue est déjà pris en charge par la Charte nationale pour la paix et la réconciliation, dont une disposition exclut toute partition du pays en proie à un séparatisme touareg.
Quelle peut être « la légitimité morale » de diriger une nouvelle transition pour quelqu’un qui a pactisé avec le diable, pardon, avec un ennemi qui ne cache
plus ses intentions de déstabiliser notre pays juste parce que ses protégés ont été mis hors circuit le 14 novembre 2025 et leur vrai visage montré au monde
entier ? Pour le commun des Maliens, l’Imam réfugié en Algérie est un allié de la première heure de ceux par la faute de qui « les populations maliennes
continuent de subir la terreur et la cohésion nationale ». Nous avons toutes les raisons de croire qu’Alger veut profiter de sa mégalomanie pour reprendre
pied au Mali, pour porter son manteau de « Médiateur incontournable ».
Le document conclut en rappelant que « le Mali attend un guide, pas un chef; un homme de foi, pas un homme de pouvoir… » ! Exact ! Sauf que l’Imam
n’est ni l’un ni l’autre. Bien au contraire, il s’apparente à un « homme de pouvoir » assez compromis pour « incarner l’espoir d’un Mali réconcilié, juste
et souverain » !
Hamady Tamba
diasporaction.fr

