Condamnée à la terreur et à la pauvreté par ses richesses !

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« Qui est derrière tout ça » ? C’est l’un des titres du nouvel album du reggaeman ivoirien Fadal Dey (de son vrai nom Ibrahima Kalilou Koné), « Ta Lumière », officiellement sorti le 25 avril 2025. La chanson dont il s’agit ici dénonce clairement le terrorisme en Afrique. « Arrêtez d’attaquer les pays d’Afrique. Arrêtez d’attaquer Arrêtez d’attaquer la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Nigeria, Maman Afrique… Terrorisme par-ci par là, qui est derrière tout ça ? », s’interroge l’artiste. ? Et d’assener, « vous allumez le feu en Libye et vous jouez les pompiers au Mali. Sarkozy, où est Kadhafi, le martyre de ta démocratie » ?

Moussa Bolly, Chroniqueur

« Quand un pays d’Afrique veut avancer, vous faites tout pour le déstabiliser », lâche l’artiste engagé en frappant en plein dans le mille l’une des raisons du sous-développement de l’Afrique : la perpétuelle déstabilisation pour non seulement alimenter les industries d’armement, mais aussi et surtout pour impunément piller les richesses des États africains ! Un sous-sol immensément riche, mais des populations extrêmement pauvres ! Tel est le drame paradoxal de l’Afrique. Ce qui se passe depuis des décennies en République démocratique du Congo en est la tragique preuve. Ainsi, « L’Empire du silence » du réalisateur belge Thierry Michel (à l’affiche des cinémas belges), « montre sans détours la barbarie et la complexité du conflit interminable qui ravage l’est du Congo ».

Une guerre sans fin parce que ce pays regorge des pierres précieuses à profusion, des minerais stratégiques (cuivre, coltan, lithium, or, diamants…) convoités par toutes les puissances économiques et militaires du monde. Vitales pour les technologies de la transition énergétique et l’industrie des télécommunications, ces ressources sont concentrées dans les provinces du sud et de l’est du pays. Ces minerais ont un enjeu géopolitique majeur en raison de la demande mondiale croissante. Ce qui en font des sources perpétuelles de déstabilisation de cet immense pays qui est un « scandale géologique » !

Depuis son accession à l’indépendance, le 30 juin 1960, ce pays a presque été toujours ravagé par des conflits sanglants qui ont fait des millions de victimes, majoritairement au sein de la population civile. Une tragédie entretenue par des acteurs qui se livrent (souvent par milices interposées) des combats acharnés pour le pouvoir et les richesses. Les habitants de l’est du Congo sont régulièrement contraints de fuir la terreur des groupes armés. « Le Congo est comparable à une bijouterie sans portes ni fenêtres où tout le monde vient se servir. Les seigneurs de guerre sèment la terreur, les richesses quittent clandestinement le pays et la population vit dans la misère », a récemment déploré le célèbre Denis Mukwege, gynécologue et militant des droits de l’Homme kino-congolais, ainsi que pasteur chrétien évangélique pentecôtiste.

A cause des convoitises des richesses de leur pays, les Congolais sont ballottés au gré des conflits armés

« Nous sommes des États souverains. Laissez-nous profiter de nos souterrains. Vous foutez chez nous la chienlit et vous vous étonnez de vous sentir envahi », dénonce aussi Fadal Dey.  Et d’exiger, « Mon Afrique veut se développer. Un pays d’Afrique veut avancer. Vous faites tout pour le déstabiliser. Arrêtez de nous fragiliser » ! Malheureusement, nous avons nous-mêmes une grande responsabilité dans cette fragilisation dont certains d’entre nous sont des complices actifs. Nous avons le complexe ou la peur de nous assumer pour dire « trop, ça suffit » ! Comment espérer imposer le respect à nos fossoyeurs alors que nos États sont dirigés par des gens qui n’ont ni le courage, ni l’audace, ni la vision de la fonction ? Des dirigeants qui croient qu’ils sont vulnérables sans l’onction des puissances protectrices qui n’hésitent pourtant pas à leur tourner le dos chaque fois que le peuple se fait pressant en exigeant une autre gouvernance.

Comment s’arracher des griffes des pilleurs de nos États avec une élite à la mentalité aliénée et inféodée au luxe, aux biens mal acquis pour bâtir des îlots de bonheur dans des océans de misère ? Sinon, quand les décideurs et les élites s’assument avec le soutien du peuple, il peut se produire une révolution spectaculaire. C’est la voie que les pays (Burkina Faso, Mali et Niger) de l’Alliance des États du Sahel sont en train de montrer à l’Afrique entière. Un symbole qui dépasse l’Afrique pour être une référence dans le Sud global. Récemment, au forum des médias à Kunming (Chine), quand nous nous présentions comme « Malien », certains de nos interlocuteurs réagissaient systématiquement : Assimi Goïta ! Et avec le « V » de la victoire !

« L’Alliance des États du Sahel ne pose pas seulement la question d’une renaissance panafricaine, mais plutôt d’une continuité de la recherche des moyens pour les Africains d’assumer leur destin politique », a assuré Amzat Boukari-Yabara (écrivain, historien indépendant et militant franco-béninois.), invité par le CETIM (une association à but non lucratif basé à Genève, en Suisse) pour animer une conférence sur la renaissance du panafricanisme. Pourtant, a-t-il rappelé, « ces pays que la France disait vouloir aider à se développer sont restés, depuis leur indépendance, prisonniers du narratif de la pauvreté et de l’aide au développement ».

Les habitants de l’est du Congo sont régulièrement contraints de fuir la terreur des groupes armés

De l’avis de l’écrivain-historien (que nous partageons aussi), cette région sahélienne a jadis été est « un espace stratégique pour la défense des intérêts économiques européens, et notamment pour la politique de contrôle de l’immigration de l’Union européenne, dans laquelle les pays nord-africains, notamment l’Algérie, la Libye et la Tunisie jouent un rôle de première frontière de l’Europe ». C’est dans un contexte de guerre asymétrique que l’Alliance des États du Sahel a été créée le 16 septembre 2023 par la charte du Liptako-Gourma. Le Mali du Colonel (aujourd’hui Général) Assimi Goïta, le Burkina Faso du Capitaine Ibrahim Traoré et le Niger du Général Abdourahamane Tiani ont donc instauré un pacte de défense militaire pour « sortir de la tutelle occidentale et du cadre de la CEDEAO ». Ainsi, a rappelé Amzat Boukari-Yabara, « des pays qui étaient tenus à l’écart de leurs propres affaires ont décidé de repartir sur une approche beaucoup plus endogène ».

Quand on s’assume pour s’élever à hauteur des attentes et des vraies préoccupations de son peuple, il est aisé de s’émanciper, de briser les chaînes de la domination et de la stigmatisation, de la terreur et de la pauvreté !

Moussa Bolly

diasporaction.fr

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