La crise récente d’approvisionnement en hydrocarbures et en marchandises an mis en lumière la fragilité structurelle du Mali et la crise politique entre le Niger et le Bénin la fragilité du Niger. En quelques jours, notre économie, nos entreprises et nos ménages ont mesuré la dépendance dangereuse du Mali à des corridors routiers entièrement contrôlés par des États voisins. Ce choc logistique a rappelé une vérité simple : la souveraineté nationale commence par la maîtrise de ses voies d’accès à la mer.
Dans ce contexte, un projet souvent évoqué mais rarement analysé dans toute sa portée stratégique mérite une attention nationale et régionale : le port fluvial international d’Ambidedi, situé dans la région de Kayes, sur le fleuve Sénégal.
Ce port pourrait devenir, non seulement un instrument de désenclavement pour le Mali, mais également un corridor majeur pour l’ensemble des pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) — Mali, Burkina Faso et Niger.
Ambidedi n’est pas une infrastructure parmi d’autres : il porte la promesse historique d’un accès autonome à la mer, objectif poursuivi depuis la Première République mais jamais atteint.
- Ambidedi : du port intérieur au port international
Le projet d’Ambidedi vise à faire du Mali un acteur direct du commerce maritime mondial, sans dépendre d’un port étranger. Contrairement au port fluvial de Kayes initialement envisagé, Ambidedi est conçu comme un port fluvial international intégré aux circuits maritimes mondiaux.
Cela signifie que :
• les compagnies maritimes pourront inclure Ambidedi dans leurs routes commerciales,
• les marchandises débarqueront directement au Mali sans passer par Dakar,
• le pays disposera d’un point d’entrée autonome pour ses hydrocarbures, conteneurs, engrais, machines ou produits alimentaires.
C’est une révolution logistique dont la portée dépasse le cadre national.
- La fin des ruptures de charge : un avantage décisif
Le système actuel impose plusieurs ruptures de charge, notamment au port de Dakar :
1. déchargement du navire,
2. stockage, formalités, manutention,
3. rechargement sur camions ou wagons vers le Mali.
Chacune de ces étapes génère :
• des coûts élevés,
• des retards,
• des risques de détérioration,
• des coûts d’immobilisation,
• une dépendance politique et administrative.
Avec Ambidedi comme port international, toutes ces ruptures de charge disparaissent.
Résultat :
• baisse de 30 à 40 % des coûts logistiques,
• suppression des frais de transit à Dakar,
• délais de livraison largement réduits,
• davantage de prévisibilité pour les entreprises,
• renforcement de la compétitivité industrielle et agricole du Mali.
Cette seule transformation améliorerait durablement les prix des denrées, des intrants industriels et des matériaux de construction.
- Pour la première fois, un accès autonome à la mer pour le Mali et les autres pays de l’AES
L’enjeu stratégique est immense.
Avec Ambidedi, le Mali disposerait pour la première fois de son histoire moderne d’un corridor souverain reliant directement le pays à l’océan Atlantique, via le fleuve Sénégal.
Cela signifie :
• absence de dépendance aux ports étrangers,
• contrôle intégral de la chaîne logistique,
• réduction du risque d’interruption des approvisionnements,
• autonomie dans la gestion des flux pétroliers et stratégiques,
• possibilité d’exporter directement coton, bétail, produits agro-industriels, or semi-raffiné ou lithium transformé.
Ambidedi devient ainsi le début d’une autonomie logistique réelle, et non déclarative.
- Ambidedi : un outil collectif de désenclavement pour l’AES
L’AES est confrontée aux mêmes vulnérabilités logistiques :
dépendance aux ports du Golfe de Guinée, coûts élevés, instabilité récurrente, pressions de marché ou décisions politiques unilatérales.
Ambidedi apporte une réponse structurelle à ces défis partagés.
Pour le Burkina Faso
Le corridor Ambidedi → Bamako → Bobo-Dioulasso ou Ouagadougou offre :
• une voie logistique plus courte que celles actuelles,
• des coûts réduits de moitié,
• un corridor plus sûr en période de tensions politiques régionales.
Pour le Niger
Ambidedi offre un double avantage :
• accès autonome indirect à l’océan via Bamako,
• sécurisation des flux d’hydrocarbures, d’engrais et de produits stratégiques.
Ainsi, Ambidedi devient le port intérieur commun de l’AES, un outil fédérateur de souveraineté collective.
- Un moteur de développement pour la région de Kayes et toute la vallée du fleuve Sénégal
La construction du port d’Ambidedi entraînera une transformation économique profonde :
• création de milliers d’emplois directs et indirects,
• zones logistiques et industrielles intégrées,
• chantiers navals fluviaux,
• plateformes de transformation agro-industrielle,
• dynamisation du commerce régional et réduction de la migration ,
• modernisation des infrastructures routières et ferroviaires.
Ambidedi deviendra un pôle d’innovation, d’agglomération économique et de rayonnement logistique.
- Un outil géopolitique majeur pour réduire les dépendances extérieures
Les corridors actuels sont soumis :
• aux crises politiques dans la région,
• aux instabilités sécuritaires,
• aux congestions portuaires,
• aux pressions diplomatiques ou économiques extérieures.
Ambidedi offre :
• un corridor alternatif sûr,
• un contrôle national complet,
• une diminution drastique des vulnérabilités du Mali et de l’AES,
• une capacité d’adaptation rapide en cas de crise régionale.
Ce port devient donc un instrument de puissance géopolitique.
Conclusion : Ambidedi, la porte de la souveraineté logistique du Mali et de l’AES
Ambidedi n’est pas un simple port.
Il est le projet de désenclavement le plus structurant depuis l’indépendance.
Il change la place du Mali dans la sous-région.
Il change la nature de notre relation à l’océan.
Il change la logique logistique de l’AES.
Il change notre capacité à résister aux crises.
Pour la première fois, le Mali peut disposer d’un accès autonome à la mer non par un slogan, mais par une infrastructure stratégique inscrite dans la géographie du pays.
Ambidedi est un projet à la fois économique, logistique, sécuritaire, politique et géopolitique.
Un projet qui pourrait transformer durablement le destin du Mali et celui de l’AES.
H. Niang
Citoyen lambda
diasporaction.fr

